Histoire & Patrimoine

 Historique de Fréthun

Frethun (4)Les origines de Fréthun prêtent à controverse.
En effet, on a pu penser que le nom de Fréthun dérivait du latin « Frethum » (qui veut dire golfe), et on a cru qu’il y avait à la place de notre village au Xème siècle, un bras de mer qui couvrait les bas-fonds du pays depuis Sangatte jusqu’à Watten.

Il y a toutefois peu de chance pour qu’il en soit ainsi, attendu qu’on a retrouvé en 1829, 1836 et 1847 des poteries romaines sur le territoire de Fréthun.
Au lieu-dit « les Alleux », qui était autrefois une carrière de moellons appelée « Carrière des Morts », on a découvert en 1912 une certaine quantité de squelettes d’une stature colossale assez bien conservés.
On a trouvé également des armes. Il est très possible qu’il ait existé là un cimetière mérovingien.
L’apparition historique de Fréthun date de façon certaine de la fin du XIème siècle. A cette époque, le village s’appelait Fraitun. On peut noter une ressemblance avec Freton, ville du Comté de Norfolk en Angleterre, qui vient de Free town qui veut dire « Ville libre ».
Fraitun s’est transformé en Fraitum, puis Fratum, pour devenir en 1179 Fraitin et en 1215 Freitun. Le nom du village s’écrivit ensuite Fretin, puis Fertin à la fin du XVIIème siècle. Sous l’occupation anglaise, Fréthun s’appela Froyton et Froytoune.

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Les anciens seigneurs de Fréthun
En 1108, les Seigneurs de Fréthun sont des personnages importants. Le premier connu s’appelait Arnulphe de Fraitun. En 1164, on note l’existence de Clarembaut de Fraitin et en 1213, celle de Simon de Freitun.
Dans les dernières années du XIVème siècle, un noble chevalier de notre village, Gillebert de Frethun, eut un rôle historique de premier plan. Ayant refusé de prêter serment de fidélité au roi d’Angleterre, il avait vu « ardoir sa maison », ce qui signifie raser sa demeure sur les ordres d’Edouard III. Gillebert de Fretun résolut de se venger. Avec 2 vaisseaux et des gens de guerre, il mena pendant 13 ans une lutte sans merci contre les anglais. Après avoir remporté de nombreux succès contre la flotte anglaise, que le roi avait été obligé de mobiliser toute entière, il fut finalement tué en 1402.
La famille des seigneurs de Fréthun s’éteignit à la fin du XVIIème siècle avec Elisabeth de Fertin qui avait épousé André de Saint-Blémond.
Le château des seigneurs de Fréthun se trouvait à l’emplacement de la ferme des « Alleux », sur la limite de Coquelles et près de l’ancienne route de Calais à Boulogne. Les armoiries des seigneurs de Fréthun étaient « d’argent à la fasce d’azur chargées de trois tours quarrées de gueules ».

 

Histoire de la Mairie
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La commune a souhaité mettre de l’ordre dans ses archives. A cette fin, un local spécifique a été créé dans les combles de la mairie. Une prestation d’inventaire et de classement des archives a ensuite été confiée à la société Dop’Archiv. La réalisation de cette mission a permis de révéler un fond documentaire important sur la fondation Becquet de Cocove qui occupait auparavant le bâtiment de la Mairie. D’où l’idée d’exploiter ces documents pour en connaître un peu plus sur l’histoire de celle-ci. Une mission de synthèse a ainsi été confiée à un jeune étudiant de la commune, Rémi Heddebaux, qui a épluché pendant 1 mois toutes les archives relatives à la fondation.
Voici un résumé de son travail qui vous permettra d’en apprendre un peu plus sur l’histoire de notre commune.rue de l'église
La fondation « Becquet de Cocove » est née de la volonté testamentaire de Madame de Cocove.
Dans son testament en date du 17 janvier 1862, elle souhaitait que tous les biens qu’elle n’a pas donné à ses parents soient alloués à la formation d’un établissement, dans le canton de Guînes ou de Calais, destiné à accueillir six dames veuves et peu fortunées de sa famille ou, à défaut de membres de sa famille, des veuves et orphelines d’officiers français de l’artillerie. Elle souhaitait également que cet établissement soit dirigé par des religieuses et que celui-ci dispose d’une école de filles.
Afin d’aider à la création d’une telle œuvre elle lègue plusieurs propriétés dans le calaisis.
Mais ce n’était pas suffisant pour créer une maison de repos comme le souhaitait Madame de Cocove. Aussi en 1868, Cornélie Podevin cède à la fondation un terrain sur Frethun. La construction de l’établissement coutera 52 990 Anciens Francs.

A sa mort en 1881, Cornélie Podevin lègue à la fondation 342 obligations sur les chemins de fer d’une valeur de 156 437 Ancien Francs, une somme de 5 437 Ancien Francs issu de la vente de ses bijoux et le reste de son argent : 650 ,11 Ancien Francs. En contrepartie, elle souhaite que l’on célèbre une messe annuelle en l’honneur des bienfaitrices de la Fondation. Cette messe coutera 3,50 Anciens Francs selon l’Eglise. Elle souhaite également que l’on entretienne sa sépulture. Enfin elle laisse des terres à Coquelles dont le revenu servira à la distribution de vêtements pour les personnes âgées et les enfants pauvres de la commune. Afin de la remercier son portrait trônera sur les murs du couloir.

La fondation est gérée par une commission administrative de 5 membres présidée par le Maire et composée de 4 autres personnes nommées par le Sous-Préfet dont un représentant du ministre de la guerre et un du ministre de la santé. Cette commission est aidée par un secrétaire pour la gestion administrative quotidienne.

Château de Fréthun

Fonctionnement :

Le service interne est assuré par trois religieuses sous la surveillance de l’administration. Les domestiques de la maison sont sous la direction de la supérieure. Les religieuses ont obligation de prodiguer de bons soins aux pensionnaires dans la santé et dans la maladie.
Tous les quinze jours la supérieure inspecte les chambres afin de voir si le linge est changé régulièrement. En effet les dames ont une obligation d’hygiène et de propreté.

Elles sont invitées à porter des tenues modestes de préférence de couleur noire et en laine, soie ou coton. Les dames sont cordialement invitées à assister à la messe le dimanche ainsi que lors des fêtes. Des messes sont organisées pour les bienfaiteurs de l’asile une fois par mois dans l’établissement.
Les invités sont admis uniquement si la supérieure en donne l’autorisation. Ceux-ci ne peuvent voir les dames qu’au parloir. Les proches parents dont les visites se font rares et succinctes ont la possibilité de prendre leurs repas avec les dames.

On y sert trois repas dans la journée :
– Le matin à 7h l’été et 8h l’hiver on y sert le petit déjeuner composé de tartines, d’une tasse de café au lait ou de thé
– Le midi à 12h on y sert un potage, un plat de viande, un plat de légumes, de la bière, 6 CL de vin. Le dimanche et les jours de fêtes un plat de viande rôtie est servi.
– Le soir à 18h on y sert un plat de viande, un plat de légume, de la bière et 6 CL de vin.

Les sorties sont possibles pour les dames majeures, âgées de plus de 21 ans donc. Elles doivent être rentrées pour 20h45 au plus tard et à 21h elles doivent être dans leur chambre. Du 15 octobre au 15 avril si les dames doivent sortir après le repas du soir elles doivent justifier des motifs et du lieu de leur sortie.
Les absences doivent être justifiées auprès de la supérieure qui peut refuser d’accorder sa permission.

Les « mauvaises lectures » sont proscrites. Les règles de bienséance, de politesse et de respect doivent être respectées dans et hors de l’établissement.

On voit donc que l’asile, qui avait très bonne réputation vue les nombreuses demandes d’admission, tenait plus d’un couvent que d’un établissement d’accueil « simple ». Les dames n’avaient aucun frais : le chauffage, l’éclairage, la blanchisserie, la nourriture étaient assurés par l’asile, mais en contrepartie, il y régnait une discipline très stricte.

Les ressources de la fondation provenaient essentiellement de la location des terres léguées par Madame de Cocove et d’un portefeuille de titres continuellement renouvelé.

La fondation se dote d’un dispensaire en 1894. C’est un lieu où le médecin de la fondation peut recevoir les pauvres à des heures fixes pour prodiguer des soins.

Il est décidé en 1901 de ne plus accueillir deux membres de la même famille au même moment au sein de la fondation suite à des soucis. Puis en 1911 il est décidé d’exclure une pensionnaire pour des absences répétées. La commission a jugé que cela portait atteinte à la réputation de l’établissement.

Image ancienne du café Denez

La Fondation entre les deux guerres mondiales :

Le 18 février 1915 l’asile Becquet de Cocove se voit contraint par le ministre de la guerre de recevoir les militaires blessés jusqu’à la fin de la guerre et dans la limite de ses moyens (20 lits).
La guerre rendant les choses difficiles, il est décidé en 1917 de supprimer la subvention de 400 Ancien Francs au bureau de bienfaisance, qui se chargeait de la distribution des vêtements selon la volonté de Cornélie Podevin, et de supprimer également les fournitures données aux élèves pauvres pour un montant de 300 Ancien Francs. On ne sert également plus qu’un verre de vin au lieu de deux et trois plats de viandes par semaine, le soir, au lieu de 7.

En 1918 c’est le poste de secrétaire qui est supprimé.
En 1928 l’éclairage électrique fait son apparition au sein de la maison.
En 1934 il est décidé que la plaque de marbre trônant sur le fronton du bâtiment et indiquant « Asile Becquet De Cocove » sera remplacée par une plaque arborant « Fondation Becquet de Cocove ». Les administrateurs ont trouvé que le terme « asile » avait une connotation péjorative.
En aout 1939 la maison est occupée par la garnison de Calais ; en octobre c’est au tour de l’aviation française d’occuper les locaux. Elle réquisitionne toute la maison ne laissant à la directrice que son bureau. Le 8 mai 1940 les anglais prennent place dans la maison.
Mais les militaires ne sont pas les seuls occupants de la maison durant cette période troublée. Le 10 mai 1940 la directrice se trouvant dans l’impossibilité de contacter l’administrateur de la fondation et étant du même avis que le secrétaire de mairie, 150 réfugiés belges sont accueillis. Ces derniers après 6 mois seront reconduits chez eux par les allemands.
Le 25 novembre1940 la directrice ainsi que tous les occupants sont sommés de quitter les lieux dans les deux heures. Ils se réfugieront pour la plupart dans une maison du village.
A la libération, 4 allemands demeuraient encore en ces lieux alors que les canadiens étaient à la gare. Mais la fin de la guerre ne signifie pas la fin de la réquisition pour la fondation. Elle restera réquisitionnée par la Royal Air Force où elle organisera des bals de façon hebdomadaire. Puis, petit à petit, c’est devenu un hôpital militaire et ce jusqu’en octobre 1948.
La toiture avait été endommagée par la pose d’un mirador, les peintures dégradées, de même que les plafonds, certaines portes étaient manquantes, des fenêtres ont été brisées. Le total des dommages a été estimé avec les honoraires de l’architecte à 864 542 Ancien Francs de 1939 en 1948.
Ces frais ont été remboursés par l’Etat au fur et à mesure de l’avancement des travaux de réhabilitation grâce à la loi portant sur les dommages de guerre.

Le temps des difficultés économiques :

En 1956 par soucis d’économie lorsque le jardinier, qui est également le concierge, part à la retraite la fondation lui propose de garder son logement gratuitement en échange de quoi il fournira des légumes aux dames pensionnaires et entretiendra les jardins. Cette année là on réduit également l’indemnité offerte aux pensionnaires pour le charbon.

Le 28 avril 1959, le maire, qui explique les motifs du refus d’admettre une pensionnaire (Leuliette-Valdevière) nous dit que la situation économique actuelle de la fondation est faible. Il a dû réduire le personnel à sa plus simple expression. On apprend également qu’à cette date il n’y a plus que deux pensionnaires sur le nombre de six voulu par Madame Cocove. Les pensions des veuves d’officiers étant devenues suffisantes pour leur permettre de vivre par elle-même ou en famille et la discipline d’un autre temps repoussant les plus pauvres.

En 1963, il est dit en commission administrative que les ressources de la fondation ne permettent pas à cette dernière de prendre en charge de façon permanente la veuve désireuse d’entrer à la fondation. La situation devient donc préoccupante.

Si bien qu’en 1966 un projet de reconversion de l’Asile est proposé. Il est demandé au président de la
Commission Administrative des Hospices de Calais si l’asile peut être transformé en maison de retraite. Celui-ci ne refuse pas le projet mais exige que la reconversion soit faite aux frais de la fondation et que tous les biens de la fondation lui soient remis, le but de l’association ayant changé. C’est ce dernier point qui pousse le président de la commission administrative de l’asile à renoncer à ce projet.

Les deux classes que comporte l’asile étant inoccupée en 1967, il est décidé d’en offrir la location à l’Association Familiale d’Aide et de Protection à l’Enfance Inadaptée du Calaisis.

gare sncf

La dissolution :

Suite à l’échec de la reconversion de la Fondation, la commission d’administration, en accord avec le préfet et l’« Association d’Entr’Aide des Veuves et Orphelins de Guerre, décide que la fondation ne peut plus poursuivre son activité.

En 1969 le conseil d’administration de la fondation vote sa dissolution avec la donation à la commune de Frethun de la résidence se situant sur la commune, à charge pour elle d’en faire usage pour des œuvres sociales ou communales. Le reste des biens immobiliers sera donné à l’association sus nommée afin de créer une maison de repos pour les veuves de guerre à Paris. Cette décision est acceptée par le conseil municipal. Un arrêté ministériel de 1970 vient confirmer la dissolution de la fondation. Aucun des locataires de la fondation ne fut exproprié lors de la vente des biens. Ils purent tous acquérir la propriété qu’ils occupaient.

Les bâtiments qui abritaient autrefois la fondation ont été mis à disposition de l’ A.F.A.P.E.I par la commune dès l’année 1971 pour un loyer annuel de 2 400 francs. En 1974. Cette école contenait 49 élèves répartis en cinq classes. Le tout au rez-de-chaussée, l’étage n’était pas utilisé.
Aujourd’hui la mairie de Frethun se trouve en lieu et place de la fondation. D’ailleurs si vous levez la tête en arrivant à la mairie vous pourrez apercevoir sur le fronton la plaque de marbre avec la mention « Fondation Becquet de Cocove ».

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